[RP] Escapade nocturne

Partie 1
Dans sa chambre au Palais - Aux environs de vingt-deux heures -

Voici deux jours qu'elle a foulé le sol de la Principauté de Guernesey. Entre les sorties officielles, les rencontres obligatoires au Palais, les rapports qu'il lui a fallu consigner méticuleusement afin de constituer un solide dossier à destination du Régent et de la Duchesse de Saint-Samson, l'on peut dire que Victoria n'a pas chômé. Elle s'est pliée sans sourciller à ces nombreux dictats que l'étiquette et le sens du devoir lui imposent mais à présent qu'elle se retrouve seule dans cette chambre immense pour sa seconde nuit, Victoria fait les cent pas en cherchant le moyen de pouvoir se soustraire à toutes ces obligations pour quelques heures. Heureusement, la jeune fille est menue et légère comme une plume, ses pas ne risquent donc pas d'alerter qui que cela soit.

Il lui faut trouver le moyen de se carapater des lieux afin d'aller rejoindre son Oncle Sandro à qui elle a donné rendez-vous ce soir précisément. Elle pense à ces retrouvailles depuis qu'elle sait ce voyage programmé. Sa correspondance avec Sandro Falcone ne s'est jamais tarie, Victoria étant très proche de cet Oncle aux mœurs et à la vie atypiques. Sandro est son confident, son père de substitution, elle l'aime tendrement et sans compter.  Le plus difficile à présent, reste de pouvoir échapper à la vigilance constante des gardes qui plantent devant la porte de sa chambre. Sa seule issue : la fenêtre ! Pour cela elle va devoir s'armer de courage et escalader ce haut mur afin de pouvoir espérer se retrouver sur l'herbe des jardins princiers. Voilà deux jours qu'elle s'équipe pour parvenir à ses fins : Corde, tenue appropriée et autres outils nécessaires.

La jeune fille est aussi grisée que paniquée à l'idée de ce qu'elle s'apprête à faire. Après le dîner, elle s'est inclinée respectueusement devant le Régent, lui a souhaité une bonne nuit en sachant pertinemment que sa nuit à elle ne faisait que commencer et de façon incongrue en regard  des nuits précédentes. Elle n'a pas bonne conscience d'avoir menti pour la seconde fois à ce Régent tant aimé mais après tout, ce sont là de tous petits mensonges qui ne risquent pas de nuire au Chef d’État, car cela elle ne se le pardonnerait pas. Indépendamment de sa responsabilité au sein du Conseil d’État, jamais elle ne voudrait que le Régent se retrouve dans une position délicate par sa faute. Bon : escalader un mur et courir l'ile en pleine nuit n'est pas franchement ce qu'il est d'usage de pratiquer pour une jeune fille mais quel mal y a t-il à vouloir rejoindre son Oncle ? Passer par la porte et le recevoir dans les règles de l'art, lui répondrez-vous ! Oui mais non. Sandro ne franchira jamais le seuil du Palais et cela la jeune fille le sait. Alors .... poudre d'escampette et en avant l'aventure !


D'abord : se changer. Pour se faire, Victoria a opté pour une tenue ... d'homme ! La voilà donc à laisser tomber froufrous et dentelles, à se bander les seins avec force afin que sa poitrine se retrouve aussi plate qu'une galette. L'opération est compliquée et douloureuse mais elle est pugnace la petite et rien ne l'arrête. Une chemise à jabot vient recouvrir ce buste à la garçonne, un pantalon, des bottes impeccablement cirées, un long manteau noir recouvrant le tout et des gants en cuir afin que ses fines menottes soient elles aussi masquées. Dernier détail d'importance : cacher sa chevelure blondinette et frisotante ! C'est un large foulard bleu nuit qui fera l'affaire sur lequel elle pose un chapeau d'homme. Si dans le Palais l'on entend hurler : cela sera sans doute le pauvre valet à qui elle a subtilisé cette tenue pour la nuit ! Tout lui sera rendu au petit matin.

Ensuite : s'entraîner à forcir le timbre de sa voix. Tout en se changeant, elle pousse quelques onomatopées afin que sa voix soit plus ferme. Il ne s'agirait pas de se faire coincer pour ce manquement.

Schcrogneugneu ! Fouchtri fouchtra !
Miminananère ! Nananinanère !


Victoria est fin prête. L'image renvoyée par le psyché est plutôt encourageante. Elle-même ne se reconnait pas. Elle est plutôt mignonnette en homme tout compte fait !

A présent : opération escalade. Elle inspire, elle expire à plusieurs reprises avec tout de même la trouille au ventre. Victoria est une petite guerrière courageuse mais là tout de même ... Elle se penche par l'encadrement de la fenêtre afin de mesurer le chemin à parcourir au bout de cette corde. Pas moins de deux niveaux ! Affolée, elle referme la fenêtre et se remet à arpenter sa chambre par des pas saccadés et nerveux.
Inspire- Expire - Inspire-Expire - De nouveau, elle ouvre en grand les battants de la fenêtre et lance sa corde qu'elle a solidement attachée au pied costaud du grand lit.

Avec souplesse, elle s'agrippe à sa corde salvatrice et commence sa descente. Elle ne se signe pas mais murmure pour se donner du courage :

*Se muoio nella mia caduta, voi non saprete anche quanto che vi amo !*


(A suivre ...)

Citation :

*Si je meurs dans ma chute, vous ne saurez même pas combien que je vous aime !*

Dans  cette ile  tout me souriait vraiment et je revoyais  la vie sous un jour nouveau, la belle rousse m'avait rejoint et là j'allais revoir la jeune  Victoria .
Fallait  dire que la drolesse avait fait son chemin , elle avait  trouvé une place à la Cour. C'était fort  comme les emplumés voulaient  vivre  les uns sur les autres et se gacher la vie  à coup de révérences et de règles absurdes.Vas y que  je te baisouille la main , que je te lèche la poire et autre chose, que je te donne des titres , je voudrais pas un de ces singes savants comme mousse.

Deux pistolets dans la ceinture , un beau costume en velours grenat , brodé d'argent , des bottes  en cuir fauve , un  large chapeau avec des plumes  blanches , mon épée et  deux litres de patchoulis  , le tout enveloppé dans une grande cape noire, Sandro le Génois marchait  vers Saint Pierre Port et plus  précisément  vers l'auberge du Palais .
Entre l'habit et le gilet  une surprise pour sa nièce.
La lande, les bois , encore la lande et  le vent qui forcissait , un bon vent d'est propice à prendre le large  vers le nouveau monde.
Comment allait  elle s'arranger pour me rejoindre , Victoria ? Elle doit  être  enfermée et gardée au Palais Princier ? Une  mocheté  qui ressemble  à une grosse meringue  avec des portes et des fenêtres.
Pour garder le rythme de la marche  me voila chantant à tue tête des chansons à boire  ou à la gloire des femmes...faciles de préférence, rien à voir  avec ma Victoria bien sur.
Dans les bois  je vois des  choses qui brillent sous la lune : Les yeux des  animaux  qui surveillent en chassant  qui est  ce prédateur sur leur territoire.

Enfin des lumières ,  voici la petite cité qui doit  se préparer à dormir.
Je ne connais que la capitainerie et cette auberge , elle est plutot minable et  les étrangers  s'y entassent en attendant un morceau de terre.
Devant la porte , je serre encore plus ma cape  pour dissimuler  mes armes et j'entre .Faut savoir que dans la principauté  faut pas  être armé , voyez vous  ça , me promener  à poil ? Des malades ces gens !
Dis moi toi le patron , me faut une  chambre , t'entends crapule ?
Va bien me refiler  une bouteille de rhum et une douceur pour la petite le comique  ou je  le crucifie  contre ses étagères.
L'homme moyennant 100 doublons d'Espagne  me  donne  clef et boissons .
Quand une Princesse arrivera  tu lui diras  que Monsieur de Montrieux est  là haut. Tu pourras  faire ça , le perroquet ?
Sans attendre la réponse  je grimpe à la chambre 8.
Quoi , c'est ça une chambre ? Juste plus grand qu'une cabine d'officier , voleurs !
Je vais y organiser une fête avec mes hommes  ici et au matin les ruines seront  au patron ...si il respire encore .
Ah , p'tite Victoria !
J'ouvre la fenètre , une gorgée  de ratafia et m'allonge sur le lit  qui visiblement est rembourré  aux noyaux de pêches.Je vais le tuer le taulier.

Cela faisait déjà quelque jour qu'ils été arrivé et les journées de Phillipe étaient toutes identiques. Le matin il faisait son rapport auprès du Lieutenant de la Garde Royal avant de disposer de sa journée à loisir. Cela devait certainement lui être profitable pour continuer ses investigations lors de sa première venue. Le premier rapport n'avait pas été très intéressant et les suivant bien pire, peut être en apprendrait il plus en continuant de visiter la ville. L'homme qu'il devait surveiller ne pouvait s'être transformé en fantôme. A 18h tapante le Lorrain était de retour auprès du Régent pour son service et ne devrait plus le quitter avant le lendemain matin.

Ce soir là il aurait un rapport plus fourni à donner au Lieutenant, pendant la balade de son Altesse qui était plongé dans ses pensées, un homme était en train de sortir discrètement par l'une des fenêtres du Palais. Cela voulait dire qu'il s'agissait de quelqu'un de l'intérieur ou que les Gardes Princiers n'étaient pas très efficaces. Suivant l'exemple de Paul le jeune homme se cacha dans les ombres que la nuit leur procuré et observa attentivement la scène.
Alors que Phillipe allait proposer d'appeler de l'aide pour l'intercepter, le Régent donna l'ordre de prendre en chasse l'intrus et c'est ainsi qu'il y eu trois ombres furtives se déplaçant dans les jardin du Palais de Saint Pierre Port!

Partie 2 :
Escalade et cache-cache dans les jardins princiers et dans la ville.


Sa descente est périlleuse, son souffle est court, son cœur en vrille, sa tête sur le point d'exploser. Tandis que le cuir de ses gants glisse sur la solide corde, elle en vient à marmonner dans sa tête à l'encontre de son Oncle Alessandro :
*Vous ne pouvez rien faire comme tout le monde !**Voyez à quoi je suis réduite pour pouvoir passer un moment en votre compagnie!*

Chlick Chlick ! Font ses gants à chaque petite avancée la rapprochant de la terre ferme. Un faux mouvement, la corde qui lâche et adieu Victoria Falcone !

Je ne vais pas mourir pas plus que me rompre les os ! J'ai encore tant à voir et à faire ! Murmure-t-elle pour se donner du courage. Son parcours progresse mais il lui semble qu'il dure des heures interminables, elle n'est pas habituée à ce genre d'exercice quand bien même elle est plutôt frondeuse et aventurière lorsque ses petits petons sont posés sur terre. Il faut dire qu'avec un oncle comme Sandro, il serait honteux qu'elle ne soit pas débrouillarde. Elle sait que si le cas inverse se produisait, il braverait tous les dangers pour venir la retrouver. Alors avec toute la gaillardise possible, elle descend, elle descend et descend encore, vers les jardins du palais !

Chliiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiick Chliiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiick ! Cette fois la descente est rapide, sèche et vertigineuse. Elle n'a pas le temps de comprendre le pourquoi du comment, qu'elle se retrouve fesses à terre ! Jamais elle n'a autant aimé cette douleur à son joli postérieur ! La bonne terre ferme, l'herbe humide et tout le tralala terrestre lui font réaliser qu'enfin elle est au sol et entière. Elle ne doit pas traîner et se lamenter sur cette douleur qui la submerge toute entière, Le choc a été rude, elle en est sonnée.

Rapidement, elle se relève non sans geindre doucement du feu qui monte jusqu'au haut de son dos. Elle espère que ses os ne se sont pas brisés et regarde la corde toujours entre ses mains. Que doit-elle en faire ? Il faudra bien qu'elle remonte jusqu'à sa chambre ? Elle n'a donc pas d'autre solution que de la laisser en prenant soin de cacher ce qui traîne au sol et en priant que personne ne l'apercevoir d'ici son retour.

Victoria se fait toute petite, petite, rase les arbres, tourne la tête à droite, à gauche, afin de s'assurer que personne ne puisse la voir - Si elle savait ! - Elle progresse lentement car elle est bien loin de connaître toutes les allées de ces jardins là ! De temps à autre, elle s'assure que son chapeau soit toujours bien encastré sur l'épaisseur de sa chevelure et avance vaillamment à petits pas. Elle commence à s'habituer à la noirceur de cette nuit sans fin et prend un peu plus d'assurance. Tant et si bien qu'elle se heurte violemment contre un arbre en pensant avoir percuté un garde royal ou un promeneur nocturne. Sans réfléchir, la voilà à s'excuser à voix haute sans songer à la masquer.

Oh ! Pardonnez-moi, Monsieur !

Réalisant qu'elle demande pardon à un arbre, elle hausse les épaules à sa propre bêtise et continue sa progression en espérant n'avoir pas été entendue car ce serait la fin de son périple.  
Enfin, elle trouve une petite issue lui permettant de quitter les jardins sans passer par les hautes grilles du Palais. Elle se félicite d'être fine et souple comme une liane car sinon elle n'aurait plus qu'à repartir en sens inverse.

Évidemment, il n'y a pas d'éclairage dans la rue qui se dessine timidement sous ses yeux quelque peu perdus, cela complique son repérage pour se rendre à l'auberge du Palais. Victoria ne va pas abandonner maintenant ! Elle serre contre son corps endolori, l'épais tissu du manteau volé le temps de sa folle nuit afin de trouver un peu de la chaleur qui lui fait défaut et comme la brave petite guerrière qu'elle est, déterminée, elle s'avance vers le cœur de cette ville inconnue ...


(A suivre ...)

Coupes, deniers, épées et bâtons, c’est pas ce que j’utilise comme armes habituellement, mais ceux là, apparaissent sur mes cartes, un jeu de Florence apprit durant l’un de mes nombreux voyages, où ma spécialité était et est toujours, la tournée des crêches ! HA ha ha (tournée des crêches = la tournée des tavernes)… Là où justement, les jeux occupent les gredins de mon espèce, à gagner ou perdre de l’argent sale !

Les parties de cartes, ça c’est quelque chose qui m’plait, à l’une d’elles, j’ai perdu un œil, un abrutit me l’a fait bouffer pour avoir triché… Mais à une autre… Un gentilhomme de la noblesse, tout beau et prop’sur lui, avec des dentelles de donzelles, s’est mit à perdre jusqu’à son dernier sou, le carrosse, la montre, et les bijoux ! Ce corniaud là, avait un œil de verre, peint de blanc comme une assiette, avec une ressemblance à celui qui chez moi se sentait orphelin… Il m’avait dit plus tôt qu’à Venise, c’était comme ça, qu’on remplaçait c’qui manque, et qu’du temps des égyptiens, les riches de ces terres sèches les mettaient en diamant ! Moi, j’suis pas regardant, j’vous l’dit, et croyez que franch’ment, si j’avais pu lui prendre, de son vivant, j’m’en s’rais arrangé !

Pourquoi que j’dis ça ? Par les jupons d’ma mère qui m’ont vu naitre, c’con là s’est planté droit, l’cœur arrêté, en pleurant ses biens qu’on lui avait chouré, mort que j’vous dit ! Allongé d’vant ma porte, raide mort, plus froid, c’était pas Tout-Puissant possib’, et croyez si vous voulez, j’l’ai soulagé d’son bel œil, y pèse un peu, mais moins que ceux en plomb ou en pierre qu’on fabrique par ici, l’truc, c’est qu’au moins y m’a pas coûté grand-chose, le prix de deux sous pour faire porter le corps au jardin des allongés, dans la fosse, là bas, pas b’soin d’êt’présentés, tout l’monde y est accepté !! Ha ha ha

J’suis arrivé à Guernesey d’puis déjà deux s’maines, j’étais à bord d’une galère ramée par les forçats, et j’avais payé de quelques sous récupérés en échange d’informations par ci, par là, et obtenu une grâce que je n’espérais plus. Je connaissait pas mal de monde, c’est pour moi un avantage, je connais tous les noms d’oiseaux des malfrats trainants au port, en passant par les gripsous qui vivent cloitrés avec leurs trésors, ou encore les dames pour les faire chanter un peu !

Maraud je suis, et n’en changerais, de tous je suis ami, et de personne ça je vous promets, je garde un œil sur chacun, laissant mon tordu, mal réglé et qui ne voit rien, trop gros peut être, mais qui m’plait bien, regardant ailleurs, sans jamais rien y voir… Mes oreilles me servent, je les occupe souvent, et à ce qu’elles entendent, ma main se tend, je grapille partout sans grand mal, on me vient donner sous, or et titres de terres, pour que ma bouche se scelle, et que mes yeux se ferment !

J’ai de garanties, trop de choses à dévoiler, on me garde vivant, en espérant y gagner, mais je suis le démon si vous me croisez, le mal m’évite, de peur que j’y gagne, si Satan aurait choisi son nom, il aurait porté le mien, même si parfois idiot je semble et je signe, je ne suis pas toujours le sot que vous croirez y voir !

J’disais donc, qu’à Guernesey j’y avait prit une taverne dans les rues glauques de la citée, des endroits peu fréquentés, ni même fréquentables pour les nobliaux du royaumes étriqué, j’m’y cache assez bien, même si j’donne en secret des noms parfois contre un peu d’argent… J’dirais bien aussi, qu’il m’arrive de soulager ces soulards d’une bourse ou deux, mais faut pas l’crier trop fort, vu qu’j’accuse toujours les autres.

Le vent est au rendez vous des capes ce soir, y a du monde dans les ruelles, et même si on les voit pas vraiment, ceux qui connaissent les odeurs, comme moi, on les sent ! Y a des loupiotes, des lanternes aux yeux rouges qui brillent de ci, de là, des navires s’acharnent à leurs réparations, d’autres à descendre de frauduleuses cargaisons, et pire encore, certains profitent de l’ombre pour s’habiller d’anonymat.. Les vils habitent la nuit, les ladres et les malfrats, tout comme partout, l’île n’est pas privilégiée, les terres de France en sont bondées, tout autant que les pays aux noms étrangers.

L’auberge du Palais n’était pas bien loin de la mienne, elle plus en vue, la mienne plus en retrait, on nous confond souvent, et ça, j’avoue encore que ça m’plait ! Là bas le luxe s’exhibe, ici je le tais, je préfère me remplir les poches, plutôt que de l’étaler, la crasse fait très bon effet, ou presque encore si l’on me prend pour l’auberge en façade ! C’est ce soir qu’à décidé le capitaine du Corvo, de venir me rendre une visite, sa cape l’enveloppe tout entier, quelques morceaux de costume en velours grenat apparaissent ici et là, des bottes en cuir fauve, un large chapeau surmonté de plumes blanches lui font de l’ombre au visage, le tout puant de patchoulis, mais tout à fait reconnaissable, pour quelqu’un qui l’avait croisé dans les ports occupés le plus souvent par les pirates !


Une chambre… Une !

J’suis pas véxé, j’ai l’habitude d’être traité de crapule, surtout quand j’arrive à chourer quelques sous en faisant des courbettes, le pire c’est que même en m’penchant bien bas, jusqu’à cirer les pompes, j’arrive toujours à m’rel’ver ! Ha ha ha

Monsieur de Montrieux est là haut… Tout ce que môssieur veut, le perroquet sait le faire, moyennant…

Je tends les clefs de la chambre 8, il sait lire les chiffre ce bougre là… Surtout qu’il a pas l’air d’m’avoir reconnu, il a fréquenté les bouges comme moi et parfois les mêmes… Le félon, c’est moi, et plus d’une fois il a payé mes services, même qu’une fois, je l’ai soulagé de sa bourse, j’ai failli y perdre ma main, mais contre une information qui vaut son prix, on y gagne toujours la vie !!! Ha ha ha

La piaule que j’y ai filé est celle dont l’aérateur communique avec celui de ma chambre, j’entends tout au mieux, si Sandro le génois est par ici, c’est qu’y a des affaires à faire, et je veux en être, on a toujours besoin de quelques piècettes d’or en plus, et je sais qu’il n’est pas sans rien !

L’enseigne prête à confusion, et je m’amuse à l’astiquer souvent, « Auberge du Palais » la vraie est avec un « L » apostrophe, et j’arrive à lui prendre pas mal de clients… C’est encore comme ça que… Tiens…. C’est qui c’lui là ??? J’connais tout l’monde, ou j’le connais pas ? Bordel, v’là aut’chose !

Un drôle d’oiseau chemise à jabot, un pantalon, bottes cirées, long manteau noir, gants en cuir et une espèce de foulard bleu nuit débordant d’un chapeau chiqué. Une sorte de tenue de valet de luxe, pas du genre à bosser pour les petites gens… hum hum

C’est quoi ça ? Un freluquet chétif qui arrive par ici, ça doit avoir de quoi payer, et certainement assez pour remplir ma bourse maigre du soir ! J’attends qu’y rentre, ou j’vais-je pêcher ? J’suis sûr que sous son manteau, y a une belle bourse qui m’f’ra sourire, j’fini d’astiquer ma lanterne en plus d’la pancarte et j’y sourit avec insistance, pourvu qu’mon œil l’y fasse pas peur !!!

Allongé  sur  cette paillasse dure à vous briser les os Sandro pensait , il avait de quoi faire car sa vie  prenait un tournant important .Devant lui  il imaginait la petite Victoria telle qu'elle était  lors de leur dernière  entrevue : Jolie , fine et  élégante , l'esprit vif et une connaissance parfaite  de l'Italien et du Français  ce qui lui plaisait  , à lui, son oncle.
D'ailleurs  il avait sur lui de quoi  la rendre plus belle et à la hauteur de son poste.
Bien sur il  pensait longuement et en souriant à sa belle capitaine, aux merveilleux moments remplis de tendresse et d'innocence  mais aussi de nombreux ébats charnels qu'ils passaient ensembles .
Mais il y avait un détail qui revenait sans cesse , obsédant, qui soulevait une sensation répugnante , qui avait un arrière gout de crime et de trahison , cette image  c'était le regard torve de l'aubergiste.Ce type  était une saleté  mais rencontrée où ? Ce rat , cet abscés murissant c'était  Maubec ...Maubec Lebol ! L'homme qui représentait la race  la plus méprisable aprés les crapauds , celui qui vendrait son âme pour une bourse  d'or . Sandro  se leva d'un bon , il réalisait:
Je l'avais connu  à Catane, il me soulageait discrétement d'une  bonne quantité de ducados  que j'avais dans ma bourse, je l'avais stoppé en saisissant sa main et en la clouant  à la table d'un coup de poignard. Il avait hurlé  le goret  mais  aprés avoir retiré mon beau couteau à manche d'or et de nacre , une rasade de grappa  sur la plaie  je repris mon bien et il négocia sa survie en m'indiquant le passage dans la nuit  au large de Catania d'un navire de la Sérenissime  chargé d'épices  et de riches marchandises venant du Levant pour la Cour d'Espagne.
Par sécurité j'embarquais l'affreux  avec nous et l'information étant  bonne   peu aprés minuit  toute la cargaison était notre...le bateau vénitien privé de ses mats dérivait au gré des courants.
Puis au hasard de mes campagnes  je l'ai revu  à Carthagène, Alger, Marseille,Le Pont, Porto et maintenant il était ici? Me sachant ici  il  était capable de me dénoncer en appelant le gué  , la crapule .Pire  quand il va voir ma nièce arriver il peut l'enlever et la séquestrer  pour m'extirper des  sols ?

A cette simple idée , Sandro reprend ses armes , des bruits de pas dans l'escalier , vraiment bizarre ce sont des bruits de talons de bottes ? Mais à coup sur ce sont deux hommes . La fripouille l'aurait elle vendu ?

Le freluquet chétif est miro, non seulement il m’a pas vu lui sourire, mais en plus il me passe devant pour rentrer dans mon auberge, j’en profite à le suivre en silence, et j’reluque la dégaine du mignon, jusqu’à me coller derrière mon comptoir et voir c’qui veut en attendant qu’il ouvre la bouche, surtout qu’il a pas l’air sûr de c’qui veut, planté et silencieux en milieu d’ma salle d’accueil grand luxe sans miroirs, sans chaises et sans propreté, ça paye de voir si bellâtre venir l’animer ! Mon œil de verre regarde de l’autre côté, ça donne l’impression que j’vois tout partout et en même temps ! Rigolez pas, c’est pas marrant, j’saurais trouver à grapiller chez vous sinon ! Humpfff

Le gamin a pas l’air enchanté d’me voir là, qu’on dirait qu’ma trogne a la lèpre, qu’est c’qui en a ? J’te plait trop petit ? Ha ha ha Toute façon, j’aime pas les marmots, les vieux et les miséreux, moi j’ai pas d’cœur tendre, et c’lui qu’j’ai m’convient, y m’aide à grapiller chez ceux qu’en on un peu… A vot’bon cœur les gens !

Sa voix est bizarre, fine comme un damoiseau qu’aurait coincé deux d’son trois pièces sous un étau, avant d’la pousser gueulante et au patois malfamé, ça jure un peu avec le costume, j’en conclu qu’la trouille doit lui serrer le ventre… Ca m’amuse, j’étale un sourire de mes dents jaunies, qu’avaient gardé entre certaines, les restes du r’pas d’midi, du soir, mais aussi d’la veille, avant que d’répondre en lui soufflant ma super haleine de mâle de la cour des miracles, ou encore des bas fonds des tavernes d’où j’suis issu :

Messire de … Mon… trieux ?

Par la queue d’un évêque sous sa toque, (j’parle bien d’sa tête là, esprits tordus !) C’est quoi c’bordel ? C’est ça sa princesse ? Ben merde alors ! Le damoiseau est d’la jaquette et le vilain s’en donne rendez vous en secret ? C’est une affaire en or tout ça, si j’arrive a garder mes moignons et ma tête après coup, je pourrais gagner des sous ! Humpffff intéressant !

Monsieur Montrieux est à l’étage, je vais vous accompagner si vous permettez…

J’passe devant, et j’tape chez l’pirate, j’aurais bien sifflé la charge en m’étranglant de rire, mais je préfère attendre de voir sa tête, quand qu’il verra que « je sais tout ! »

TOC TOC TOC
Monsieur… Votre princesse est arrivée… Enfin… Je crois !

Je garde le rire au fond de moi, même si de mon œil valide je reluque le freluquet, grimaçant de ma bouche déformée par l’envie, et me rendant plus gourmand de savoir… D’un coup de langue baveuse, je claque ma bouche, prêt à parler à nouveau, dès que le génois aura enfin ouvert la porte, ou donné la permission de l’ouvrir ! Je ris, je ris, ben quoi ? Là j’suis certain d’gagner d’l’argent !!! Je savais qu’un jour je pourrais faire chanter le brigand, ça au moins c’est une bonne idée de transaction !

Cette fois aucun doute les pas sont pour moi, on frappe! Inutile de perdre du temps , saisissant les pistolets et l'autre bien en main , Sandro ouvre violement la porte et en une fraction de seconde reconnait Maubec, la bouche du cano se colle au centre du front du nuisible.

Tiens donc Maubec , tu pensais que je t'avais oublié ? Comment peut on oublier un triste débris comme toi.
Entrez jeune homme !
Il a reconnu habillée en jeune chevalier sa petite nièce adorée.
Dis moi l'affreux , trouve moi du vin d'Italie "spumante", prends toi une bouteille car si tu tentes une entourloupe ce sera la dernière . Mes hommes sont en ville et surveillent tout
Puis refermant la porte d'un coup de pied , Sandro ote le chapeau du jeune spadassin qu'il prend par les épaules et qu'il serre dans ses bras.
Tu es ravissante vétue de la sorte , tu me rappelles Angelynn.
Débarasse toi et assieds toi sur le lit , il est aussi dur que les tabourets mais tu y seras mieux.
Il te faut tout me raconter , tout ce que tu as fait avant et ce , depuis que je suis parti...mais avant attends .
Sandro sort de sous son habit la grosse bourse de velours et plonge ses doigts dedans et tel un magicien du Pont Neuf à chaque fois il en sort un objet , un tour de cou avec un camée à l'Antique, une bague avec un saphir et une autre avec un rubis entouré de diamants, un bracelet en or massif avec des perles noires et enfin une croix faites d'émeraudes.
Voila qui te rendra éblouissante et qui fera que tu te seras plus admirée que les autres femmes .
Dis moi , ton Régent il va t'anoblir quand ? Tu sais que ce jour là je serai présent ...avec tous mes hommes et Angie. Nous ferons une fête comme ils n'ont encore jamais vu, Victoria , Princesse de France ...Oh que ça sera beau ! .
C'était le bonheur absolu dans les yeux de Sandro que de voir Victoria.Toutefois en pensant à Maubec il était assis face à la porte et les pistolets sur la table à portée de main, le laid pouvait bien revenir avec quelques cuistres de sa trempe.
Quand je te vois vétue de la sorte je t'imagine plus à mes cotés en mer qu'en train de danser la pavane !
Un vrai rire de joie sort de sa gorge et il ajoute
Allez , raconte ,Princesse.

Par les jupons d’la vieille édentée d’St Supplice, on dirait bien qu’le gamin fait les gros yeux et rechigne à grimper les marches, j’lui fait donc si peur que ça ? Ce doit être mon œil, j’l’ai donc pas remit droit ? Bordel, ce truc glisse tout l’temps et se fout de flanc en mettant la prunelle en bas et jamais droite, du coup c’est sûr que l’mignon doit pas se sentir pénard avec moi, mais après tout.. ça m’amuse assez tout ça, avant qu’il file, j’aurais p’t’êt’le temps de chourer sa bourse, en plus que de faire chanter le génois !

Pourquoi qu’y s’est foutu s’nom là l’pirate, ça j’en sais trop rien ! Y d’vait croire que Montrieux ça faisait bien, et que l’génois c’était trop r’connaissable ? Haha Ouep, mais s’y lui m’a pas r’mit, moi j’ai d’la mémoire, et pas besoin d’aller loin pour reconnaitre sa trogne, il a un truc que tous les autres y z’ont pas.. une sale gueule, comparez pas, c’est moi l’plus beau, quand j’souris, j’attire.. si l’minot était une fille, y s’serait jeté dans mes bras, ça c’est sûr, mais j’attire pas les galants maniérés, c’qui m’étonne c’est qu’le génois si !

L’gamin collé au mur, attendait p’t’êt’de tirer sur le pirate, on sait jamais une fois que j’ai frappé à la porte, j’recule un rien en arrière faudrait pas qu’une balle ou une lame vienne me frotter avant que j’ai fait chanter ma vieille bourrique dans la chambre, faut que j’réussisse à lui faire cracher un morceau bien salé, d’quoi rassurer quelques mois d’mon salaire miséreux, les affaires sont pas faciles en ce moment !

Par les saints couillons du pape, j’me suis pas reculé assez, la fripouille me colle son canon sur le front, là où s’il crache sa poudre, j’suis sûr que j’me réveillerais pas ! Le corniaud est pas si bête on dirait, il m’a r’connu et moi j’reste bouche bée avant d’pouvoir répondre, que j’ose même pas essuyer mes sueurs, et là j’en mène pas large, d’une olive j’aurais pressé le litre :

Déconne pas l’génois, on a réglé c’t’histoire, tu t’en souviens pas ?

Et v’là qu’y fait rentrer sa princesse, un mignon qu’y va certainement payer pour faire des folies d’son corps, j’ai pas intérêt à l’ouvrir, j’saurais l’faire après une fois que j’pourrais l’faire chanter et danser, rien qu’pour qu’il paye d’m’avoir fichu la trouille !!!

Du spumante… tout c'que tu veux, c’est moi qui régale !

Y m’fout dehors en m’avertissant que ses gars sont en ville.. Ses gars ? Bordel, s’y a l’maltais, j’en ai pour la nuit à morfler, c’est pas un tendre non plus et pas du genre à m’laisser filer en douce !

Je file en bas, descends encore un étage et remarque des ombres dans la ruelle, je suis certain que c’est les sbires du génois, j’ai intérêt à la filer douce, j’vais à la cave et prends deux bouteilles, une que j’pose sur le comptoir et l’autre que je monte chez Sandro et son freluquet de damoiseau.

Toc toc toc

J’ai pas envie de me prendre une raclée, j’préfère rester tranquille, mon plateau tremble pas, c’est juste que le plancher est pas vraiment stable, du coup, forcément, y bouge un peu.. les deux verres s’entrechoquent douc’ment, c’est qu’à force de marcher, z’ont continué à bouger !

C’est le spumante !

Princesse ? Ah bèèè ça alors !!! J’ai bien entendu qu’il a appelé le gamin princesse ? Bordel ! Sandro a tourné casaque, il a prit un coup sur la tête et le v’là à aimer les garçons ! J’vais gagner gros sur ce coup là, ça c’est sûr !

Enfin seul avec ma Princesse, j'ai honte de la recevoir dans cet infame boui boui , nous serions si bien sur mon navire dans le luxe , en plus il y aurait Angie, nous serions tous les trois , comme avant. Ah quel temps perdu avec la belle rousse et pareil avec la petite . Ah si j'avais su ...
Qu'elle est jolie ! Il faudrait que le Régent soit aveugle pour ne pas voir qu'il a à ses cotés la plus belle femme de son petit royaume, mais c'est toujours pareil à sa place on ne peut pas trop bouger , on a peur des ragots , on se doit de rester à sa place , etc. Pas fait pour Sandro tout ça, la liberté , l'air du large , les lois il se les fait , et maintenant qu'il y a Angelynn dans sa vie c'est la fête tous les jours .

Euh , oui je revois Angelynn ...même assez souvent , tu vois .
Sandro était partagé entre l'envie de raconter tout de sa nouvelle vie avec la belle rousse et le temps qui était compté pour la visite de Victoria , priorité à la nièce.
Pour te dire vrai , ELLE vit avec moi. D'ailleurs tu n'as pas remarqué ? Je suis propre et je me lave tous les jours que le Diable fait .
Houla ! Ce point il en parlait comme on parle d'une punition matinale mais pas question de refuser les ablutions sous peine de perdre sa part de calins ..hé hé .
Angelynn , c'est une ....Les bijoux te plaisent ? Sinon je peux t'en trouver plein d'autres , tu demandes et tu auras.
T'aurais été un homme, j'avais des armes pour toi des pièces d'orfèvrerie mais à la Cour ....tu te vois avec un cimeterre et des pistolets pleins d'or et de nacre ?
Rit et se ressaisit puis fronce les sourcils et sent monter la colère .
Comment tu ne seras jamais anoblie ? C'est quoi cette Cour ?
Tu vois , tu serais avec moi tu serais Princesse et vite fait encore ! Non mais lui , qui l'a fait Régent , hein ?
Ouais , faut bien qu'elle soit folle amoureuse pour ne pas voir les choses en face , mais bon, elle a l'air si heureuse et puis que dire ? Elle est adorable , elle a pris des risques pour venir me voir , faut en tenir compte .
Quoi ? donner ta vie pour lui ? mais ma petite chérie c'est la dernière chose à faire , tu es si jeune , si belle , prends les vies , les ames mais toi protège toi!
Avec des idées pareilles je ne sais pas ce qui me retiens de te mettre sur mon épaule et de t'amener faire un tour de quelques mois dans les Caraïbes, tu en verras des Princes , l'or coule entre leurs mains et ils n'ont pas trente ans .

En plus je ne le connais pas le Régent , il est peut être tordu , bancal , voire pire...il se lave pas ....
La Princesse s'agenouille pour avoir un baiser quand on frappe à la porte et le rat puant arrive avec la bouteille à la main .
Sur le moment je suis furieux mais d'un coup , d'un seul , je réalise que ma nièce vétue en homme à genoux face à moi et l'autre enflure qui arrive .

(à suivre)

(L’image arrêtée est celle de Maubec qui frappe à la porte, tremblant de peur à l’idée de se retrouver une main coupée, la tête tranchée, ou un peu plus défiguré par le génois, à savoir :

J’ai pas envie de me prendre une raclée, j’préfère rester tranquille, mon plateau tremble pas, c’est juste que le plancher est pas vraiment stable, du coup, forcément, y bouge un peu.. les deux verres s’entrechoquent douc’ment, c’est qu’à force de marcher, z’ont continué à bouger !

C’est le spumante !

Princesse ? Ah bèèè ça alors !!! J’ai bien entendu qu’il a appelé le gamin princesse ? Bordel ! Sandro a tourné casaque, il a prit un coup sur la tête et le v’là à aimer les garçons ! J’vais gagner gros sur ce coup là, ça c’est sûr ! )

Me v’là donc avec une décharge de « parkinson » et face à une porte où personne ne me répond, mais c’est pas la frousse de me retrouver en mauvaise posture, je fais tout ce que je peux pour ne pas y être, j’suis du genre costaud, mais pas trop quoi ! Courageux, mais pas forcément très téméraire, faut dire que le génois est pas tendre avec ceux qui l’inspirent pas, alors j’voudrais rentrer dans ses bonnes grâces, juste assez pour qu’il me file un peu d’or et éviter les coups ! Et ces deux là, ils ont l’air de s’faire un peu trop d’compliments à mon goût, assez pour qu’ils m’entendent pas frapper à la porte, à croire que j’ai fait ça trop doux… Alors j’re toque un peu plus fort :

TOC TOC TOC

Mais la lourde, mal fermée, et vieille en plus que les gonds n’étaient pas huilés, s’ouvre au troisième porté, et s’ouvre tout grand dans un bruit énorme et fracassant de grincement, qu’on aurait dit qu’les morts étaient pas loin, j’en ai la chair de poule, c’est peu dire :

Ssssschgrrrrrrrrrreeeeeeeeeeeeeekkkkkkkkkkk

Ma bouche s’ouvre en grand, et mon œil vivant s’écarquille autant que l’autre qui manque de perdre le verre qui se trouve dedans, je vois le gamin agenouillé devant le capitaine, à croire qu’il va lui faire une gât’rie, j’ferme les yeux et j’les ouvre, ma main est encore debout qui finissait de toquer à la porte, ma gorge déglutit sans pouvoir avaler, je manque d’air et je sens que je suis pas arrivé au bon moment, j’espère juste pas finir comme le mignon à être obligé de faire des choses au pirate, pour me faire pardonner d’être là ! Bordel, je suis foutu, j’le sens mal là le truc, sûr… C’est pas mon truc moi ça, pourvu qu’y m’oblige pas, r’gardez moi, j’ai pas la gueule d’une princesse ! Si ? Mais non j’vous jure, j’suis beau mais quand même, nan nan nan… Ca y est, j’suis mort !

Mon plateau tremble de plus belle, je m’étouffe, je rattrape les verres, et non, ils tombent, je m’mets à genoux pour les ramasser, là j’regarde le minot, puis Sandro, j’ai vraiment peur qu’y m’demande de lui faire des choses, je m’relève vite fait avec les deux verres, en espérant qu’y s’approche pas, et j’mexcuse… Enfin… j’essaie !

Je… Je porte juste le… Tu vois j’pose l’plateau là…

Le plateau sur le bureau près d’la porte et j’recule en cafouillant :

J’ai rien vu ! Rien ! Sur la tête de ma pauvre mère édentée et la mienne endétée… Rien de rien ! Regarde je ferme mon œil !

Je ferme l’œil vivant, l’autre c’est plus dur, j’ai jamais réussit, il a toujours l’air de voir ce que j’vois pas ! Bordel, reuz’ment qu’ils étaient pas à poils, sûr qu’y m’tuait sans m’laisser causer ! Mais bon, j’suis mal barré, j’recule l’œil fermé, mais l’génois y fait quoi lui ???

La situation pourrait préter à jaser si je ne savais pas la vérité , j'aide ma Victoria  à se relever et prends un pistolet sur la table à l'instant même où la porte s'ouvre. Alors non seulement l'affreux  fait du bruit mais il entre ? Il se croit chez lui ce gros porc? Soit , il y est mais  au prix que j'ai payé  tout est loué pour la nuit et même pour le mois, normallement je ne devrais pas entendre une mouche voler.
Réflexe, je tire  en direction de l'homme  mais par miracle il se baisse ! Le lourdeau avait laché les verres, la balle traverse la cloison d'en face et des cris de frayeurs se font entendre .
Au secours ! on nous assassine ! AUUUUUUU SEEEEEEECOOOOOUUURS, NOUS MOURROOoons !
Pas question de tirer une balle de plus , faut penser à la petite   étouffer le scandale, saleté de Maubec ! .
Sandro se jette sur lui  récupère  verres et  bouteille qu'il tend à sa nièce et avec une force joyeuse balance un vigoureux coup de poing sur la pommette du fourbe , sous le coup l'homme tombe et  son oeil roule et descend seul l'escalier en faisant un joli bruit guilleret et cristallin  à chaque marche.
Victoria est épouvantée mais n'intervient pas, elle garde son sang froid et tient le second pistolet. Tu parles d'une visite discrète et secrète, pauvre enfant.
Déja une puis deux portes s'ouvrent les gens  descendent l'escalier pour fuir l'auberge du crime.
Une main au col de la chemise  l'autre au cul des chausses , Sandro jette  le gros paquet  dans l'escalier à la recherche de son oeil. Cette fois ce sont des bruits  sourds  avec des cris et des gémissements puis un ploooffff final suivi  d'un
Tu le paieras Sandro! ...Puis la porte d'entrée qui claque lourdement, Maubec a fuit.
Nous avions tout l'immeuble pour nous
Princesse , buvons à cet incident , tu vois  si besoin était ton oncle Sandro sera là.
Le vin pétillant faisait doublement plaisir .
Le baiser tant  attendu  n'était pas de trop et Sandro  tendit timidement  sa joue à sa nièce adorée. Oserait il raconter  cette aventure à Angie ?  Il avait un peu honte  elles étaient amies ...
Ah petite Princesse , il nous faudra trouver un moyen pour  nous voir  plus souvent..et plus au calme  .

En bas il y avait des bruits sourds  mais pas un mot. Discrétement  Sandro  alla jetter un regard , en bas  ficelé et baillonné  Maubec était escorté du second Criso et de Black Jo, San Teodoro fermait la marche.

Là, c’est sûr, je suis mort ! J’en suis certain, j’le vois à la tête du génois ! Par la queue d’une pipe, dans un bordel de nonnes, je dis n’importe quoi et ça s’voit ! Ma trogne a blanchit, que me v’là assortit au blanc sanguinolant d’mon œil, j’suis sûr qu’mes veines sont prêtes à exploser sur mes joues livides, au point qu’c’est pas possib’ de penser que j’vais bien !

Pendant que j’suis penché à ramasser et poser mes verres, j’entends une détonation, j’me r’lève, l’rouquin a son feu pointé sur moi, j’tourne la gueule et j’vois l’trou dans l’bois, j’entends les cris des voisins affolés, je joue des castagnettes, me demandez pas où qu’je connais la musique, tout est désordonné, au point même que j’pisse sans retenue dans les braies qui m’ont coûté cher…

Au secours ! on nous assassine ! AUUUUUUU SEEEEEEECOOOOOUUURS, NOUS MOURROOoons !

Et là, j’comprends plus rien, j’étais pourtant prêt à déguerpir ! Quoi qu’y s’est passé ? Chais pas… J’me suis senti agrippé, coincé, pis c’est ma joue qu’en a prit un coup, et moi j’vois plus rien, j’tombe comme une plume d’une centaine de livres doublée, mon œil saute et roule jusqu’à l’étage du d’ssous, en sautillant les marches au ralenti, alors que j’me r’trouve dans une sacré drôle de position, avec le vide de mon orbite peu ragoûtant.

J’entends plus les gens qui prennent la poudre d’escampe en criant à la mort, et moi, me v’là dans les bras d’Morphée, j’le connais pas c’lui la mais l’est sympathique quand qu’il veut. Et alors que j’crois qu’il m’emporte sur son nuage, j’me sens un chouia étranglé par ma ch’mise, et en vérité, c’est l’génois qui m’tire de l’autre ! J’ai pas l’air si fûté qu’ça d’avoir surprit l’capitaine qui s’préparait à avoir une gât’rie d’un mignon jeunot !
Quand que j’me réveille, je m’vois voler sur les marches, jeté par le pirate qui va m’payer cher l’envol occasionné !

Tu le paieras Sandro !

Arrivé en bas, je fuis et me cache dans un angle mort, loin de la lanterne et à l’ombre des regards… Mais…. C’était sans compter sur le maltais, Black Jo et Théo, les trois hommes du génois, et v’là qu’à nouveau je suis soulevé et emporté à l’intérieur, avant d’être ficelé comme un animal, et bâillonné.. J’ai vraiment l’air d’une cruche comme ça, un trou à la place de mon r’gard gauche, un chiffon qui cache ma bouche quelque peu édentée pour le coup reçu, et faisant office ce saucisson sur une chaise. Humpfffffffffff !!!

Pour une soirée copieuse en émotions, ça manquait pas d’raffut ! Les trois vilains pas beaux, m’entrainent par derrière pour me filer une dérouillée, avant de me ramener à l’intérieur et m’allonger sous l’comptoir inconscient ! J’avoue, j’fais pas l’malin, j’m’écrase, je pleure intérieur’ment ma mère, mon père, mes frères zé mes sœurs ! hoho non c’est pas le bonheur !!

San Théodoro reste sous l’comptoir à m’surveiller, Black Jo retourne dans l’arrière cour, alors que Criso remonte un étage au dessus pour se poster à une fenêtre, et là, manque l’entrée des hommes qui les croyaient partis.

Théo se cure les ongles avec sa dague, pendant que je me réveille doucement, y a du monde dans le hall, et pourtant on dirait que personne ne bouge, je gémis un peu pour alerter la foule, me sauver, qu’ils aient pitié du pauvre homme que je suis, me rendre mon œil, me laisser boire la bouteille que j’ai posé sur le comptoir et surtout pas m’obliger à faire des gât’ries au génois ! OUINNNNNNNNNN SAUVEZ MOUAAAAAAAA !!! Ouais, bon, personne m’entends, je suis bâillonné et tout ça j’le pense dans ma tête, et si San Théo m’avait pas tendu sa lame, j’aurais peut être crié plus fort ! Sniffff

Tout se passe vite, extrêmement vite. Victoria agenouillée devant son oncle pour lui quémander la bise fraternelle, n'a pas le temps de terminer sa scénette qu'un vacarme assourdissant retentit dans la chambrette. Monsieur Crapaud fait encore des siennes ! Jamais encore elle n'a eu à réfléchir aussi vite devant une situation croquignolette. Elle s'en remet donc aux ordres de son Oncle, se lève d'un bond, s'avance fièrement afin de récupérer le plateau qu'elle dépose où elle peut. Ses mains à peine libérées se retrouvent en possession ...d'un pistolet ! Effarée, la tremblotte est à sa comble lorsqu'elle essaie de maintenir l'arme comme il se doit. Jamais encore elle n'a eu à tenir un tel objet et son assurance est franchement malmenée.

Ses petites quenottes s'entrechoquent entre elles tandis qu'elle cherche à suivre de cette arme celui qui représente un danger.

Oui...oui ... Oncle Sandro clac ! clac ! clac ! - font ses dents -

Oubliés la voix de mâle, la tenue du fier chevalier et tout le reste ! Elle pointe son pistolet en essayant de ne pas le diriger vers Sandro qui tient Monsieur Crapaud par la peau du pantalon. Visiblement il reprend d'ailleurs très vite le dessus des opérations et ce pistolet n'a plus lieu d'être. Elle s'empresse donc de le reposer sur la couche de la chambre. Le roulé-boulé que Monsieur crapaud vient de faire dans les escaliers risque d'aggraver encore son physique affreux mais Victoria s'en moque bien, pas beau pour pas beau, il n'y a plus de mal.

Fugacement, elle se demande ce qu'en penserait Paul s'il la voyait dans cette chambre à faire ce qu'elle vient de faire. Elle pâlit légèrement à l'idée car sans nul doute serait-elle renvoyée manu militari sur le sol italien sans possibilité de retour.

Le calme se fait dans la chambrette et son Oncle lui tape la causette comme si rien ne s'était passé. Il est incroyable. Il faut un peu de temps à la jeune fille pour accuser le coup et se remettre de ses émotions. Légèrement vacillante, c'est la couche qui reçoit son joli petit fessier qui ne demande qu'à se poser un moment, histoire que sa tête recouvre un soupçon de lucidité.

Et bien ...je ...je n'en reviens pas...
Vos journées sont-elles toutes aussi mouvementées mon Oncle ?

Sans autre formalité la voilà à trinquer avec Sandro. Elle ne réfléchit pas à la propreté douteuse du verre, au contenu et boit cul sec la boisson offerte. La jeune fille grimace légèrement, elle qui ne boit jamais d’alcool va être bonne pour rentrer au Palais en titubant. Misère ! Comment pourra-t-elle remonter jusqu'à sa chambre ?

Oui, nous revoir au calme est une bonne idée mais avec vous, je doute que cela soit possible.

Elle rit à sa boutade pas franchement drôle mais pourtant pas si loin de la vérité que cela.

Pourquoi cet homme affreux vous en veut-il ? Il semblait déterminé à vous nuire.

Elle tend son verre pour être resservie, n'imaginant pas que sa tête risque de tourner très vite si elle ne se mesure pas dans l'ingurgitation de ce vin pétillant et frais à souhait.

Les bons sentiments  dus à la jolie Victoria reprennent le dessus et  l'affaire de Maubec est oubliée . Tout au plus il faudra remercier  les amis qui ont capturé la fripouille , sont ils encore en bas ou l'ont ils amené prendre un bain de minuit  peu importe , ce qui était la raison de sa venue c'était sa nièce .

Tu as été trés bien Victoria , tu aura ta place à mes cotés sur le Corvo Bianco quand tu voudras et je peux te dire que tu reviendras à la Cour avec des titres  aux noms exotiques qui feront réver autant que ta fortune .Sandro ferme les yeux et tenant le bout des doigts de Victoria   murmure  Princesse de Valparaiso, duchesse de Sidon, comtesse des Laurentides ...

Puis ouvrant les yeux  pose un baiser sur le front  du chevalier d'opérette.

Là ce n'était rien , juste une mise au point , un léger rappel à l'ordre sinon tu ne peux pas savoir  comme je mène une vie calme et posée ici , mieux  encore , je vais habiter dans une maison en dur et avoir un banc à l'église.


Les lèvres lui brulaient de lui parler d'Angelynn car tout ça  venait d'elle et pour elle .

L'histoire de Maubec  Lebol , tu as remarqué qu'il n'en a pas ...de bol , oui passons , vient que ce rat me doit la vie  et qu'il est juste bon à  me donner le nom des navires chargés de cargaisons interessantes , tu comprends ce que je veux dire ? Mais pour quelques pièces il est capable de me donner  à la police .Alors il faut lui faire comprendre qu'il a une place  et qu'il ne doit pas en sortir , je te parle de son égout .
D'ailleurs je veux savoir comment il a eu ce taudis qu'il nomme auberge .

Il regardait sa nièce  avec attendrissement , elle était mignonne la petite princesse .
Dis moi , tu as l'air d'aller mieux , tu as repris des couleurs , tes joues sont d'un joli rouge  et ça me plait .
Allez pour ce qui reste de cette  bouteille , achevons la ! J'irai chercher la seconde en bas , il n'a pas eu le temps de la boire .

AH ,Ah AAAAAAHHHHH!


Qu'il était content  Sandro avec sa Victoria .

Le verre à la main et regardant Victoria qui avait défait ses cheveux depuis qu'elle avait mis ses bijoux, Sandro s'exclame
Mais c'est quoi tous ces bruits en bas , les gens sont partis et maintenant ils reviennent ? Mais je vais les foutre dehors , moi !A coup de sabre ou de pistolet je vais leur expliquer que je veux être tranquille avec ma NIECE !

Au fond de lui le pirate riait en regardant sa petite Victoria, il avait l'habitude maintenant de voir une femme vétue en homme puisque c'était la tenue de la belle Angie presque tout le temps ...sinon elle était nue .
Victoria , tu sais ce que nous allons faire ? Au lieu de rester enfermés dans cet endroit affreux nous allons descendre et dresser une table en bas , je me fais fort de te trouver tout ce qu'il faut pour faire un bon repas .
Je suis sur que tous ce remue ménage t'a donné faim .
Joignant l'acte à la parole , Sandro récupère ses affaires et celles de la Princesse puis lui faisant signe de rester derrière lui ils descendent.
En bas il fait noir ou presque seule la faible lumière de la lune éclaire la pièce mais cette clarté ajoutée au souvenir de l'endroit à son arrivée suffisent pour que Sandro conduise Victoria dans la cuisine où la cheminée permet d'y voir assez pour prendre ses aises.
Deux chandeliers allumés et tout de suite le couple se met au travail: couverts , verres, pain, huitres, rotis froids et porcelet en sauce tout chaud dans sa terrine , que demander de plus ?
Sandro tire la table dans un angle pour être face à la fois à la porte et à la fenêtre et installe sa filleule à ses cotés, devant lui trois pistolets chargés , les siens et celui de Maubec puis un quatrième trouvé par terre pour Victoria.
Ma toute Belle nous allons fait un repas de roi et malheur à qui nous dérangera ...
Une bise au milieu du front de la petite et Sandro commence à ouvrir les coquillages. Il mourrait d'envie de lui dire qu'Angie partageait sa vie depuis un petit moment et qu'ils avaient plein de projets ensembles, peut être pendant le repas ?